شِفَاءُ السَّائِلِ لِتَـهْذِيبِ المَسَائِلِ

لأبي زيد عبد الرحمن بن محمّد بن خلدون

بسم الله الرحمن الرحيم

صلى الله على سيدنا ومولانا محمّد وعلى صحبه

قَالَ الشَّيْخُ الرَّئِيسُ الفَقِيهُ الجَلِيلُ المُدَرِّسُ المُحَقِّقُ المُشَارِكُ المُتَفَنِّنُ العَالِمُ العَلَمُ الصَّدْرُ الأَوْحَدُ قُطْبُ العُلُومِ الدِّينِيَّةِ وَرَافِعُ رَايَاتِهَا وَفَاتِحُ مُغْلِقَاتِ المَسَائِلِ العَقْلِيَّةِ وَالسَّابِقُ ِإلَى غَايَاتِهَا، أَبُو زَيْدٍ عَبْدِ الرَّحْمَنِ ابْنِ الشَّيخِ الفَقِيه المُحَقِّقِ المُشَارِكِ المَبْرُورِ المُقَدَّسِ المَرْحُومِ أَبِي بَكْرِ مُحَمَّدٍ بْنِ خَلْدُونِ الحَضْرَمِيِّ-رَحِمَهُ اللهُ تَعَالَى-.

الحَمْدُ لِلَّهِ الَّذِي جَعَلَ الإِلْهَامَ لِحَمْدِهِ نِعْمَةً مِنْ عِنْدِهِ،  وَالصَّلاَةُ عَلَى سَيِّدِنَا وَمَوْلاَنَا مُحَمَّدٍ، رَسُولِهِ الكَرِيمِ، وَعَبْدِهِ، وَالرِّضَا عَنْ آلِهِ وَصَحْبِهِ مِنْ بَعْدِهِ. أَمَّا بَعْدُ،

فَقَدْ وَقَّفَنِي بَعْضُ الإِخْوَانِ- أَبْقَاهُمُ اللهُ- عَلَى تَقِيْيدِ وَصْلٍ مِنْ عُرْوَةِ الأَنْدَلُسِ، وَطَنَ الرِّبَاطِ وَالجِهَادِ؛ وَمَأْوَى الصَّالِحِينَ وَالزَّهَادِ، وَالفُقَهَاءِ وَالعُبَّادِ، بِخَاطِبِ بَعْضِ الأَعْلاَمِ مِنْ أَهْلِ مَدِينَةِ فَاس، حَيْثُ المُلْكُ يَزْأَرُ، وَبِحَارُ العِلْمِ وَالدِّينِ تَزْخَرُ، وَثَوَابُ اللهِ يُعَدُّ لِإِنْصَارِ دِينِهِ وَخِلاَفَتِهِ وَيُدْخَرُ؛

طَالِبًا كَشْفَ الغِطَاءِ فِي طَرِيقِ الصُّوفِيَّةِ، أَهْلِ التَّحَقُّقِ فِي التَّوْحِيدِ الذَّوْقِيِّ وَالمَعْرِفَةِ الوِجْدَانِيَّةِ:

هَلْ يَصِحُّ سُلُوكُهُ وَالوُصُولُ بِهِ إِلَى المَعْرِفَةِ الذَّوْقِيَّةِ وَرَفْعِ الحِجَابِ عَنِ العَالَمِ الرُّوحَانِي تَعَلُّمًا مِنَ الكُتُبِ المَوْضُوعَةِ لِأَهْلِهِ وَاقْتِدَاءً بِِأَقْرَانِهِمْ الشَّارِحَةِ لِكَيْفِيَّتِهِ؛ فَتَكْفِي فِي ذَلِكَ مُشَافَهَةُ الرُّسُومِ وَمُطَالَعَةُ العُلُومِ، وَالاِعْتِمَادُ عَلَى كُتُبِ أمساية الوَافِيَّةِ بِشُرُوطِ النِّهَايَةِ وَالبِدَايَةِ، كَالإِحْيَاءِ وَالرِّعَايَةِ ؟

أَمْ لاَ بُدَّ مِنْ شَيْخٍ يَتَبَيَّنُ دَلاَئِلُهُ وَيُحَذِّرُ غَوَائِلَهُ، وَيُمَيِّزُ لِلْمُرِيدِ عِنْدَ اشْتِبَاهِ الوَارِدَاتِ وَالأَحْوَالِ مَسَائِلَهُ. فَيَتَنَزَّلُ مَنْزِلَةَ الطَّبِيبِ لِلْمَرْضَى، وَالإِمَامِ العَدْلِ لِلأُمَّةِ الفَوْضَى !

Shifâ’ as–Sâil  li Tahdhîb al-Masâil

d’Aby-Zaid Abdu-r-Rahmân ben Muhammad ben Khaldûn

Au Nom de Dieu le Tout-Miséricordieux, le Très Miséricordieux !

Que Dieu bénisse notre Seigneur et Maître Muhammad et ses Compagnons !

Voici ce qu’a dit le Maître éminent, le juriste vénérable, le docteur à l’esprit rigoureux, versé en plusieurs disciplines, le savant illustre et sans égal, Pôle et Porte-drapeau de sciences religieuses qui ouvre à la lumière les réduits obscurs des questions spéculatives et plus avant que nul autre pénètre jusqu’en leurs profondeurs, Abû Zayd ‘Abd al-Rahmân, fils du Shaykh, du juriste doué d’expérience spirituelle, versé en plusieurs disciplines, du pieux, du saint, du regretté Abû Bakr Muhammad Ibn Khaldûn al-Hadramî- Dieu lui fasse Miséricorde !-

Louange à Dieu qui destina l’inspiration (al-ilhâm) à Sa louange par un effet de sa condescendance ! Que la bénédiction et le salut soient sur notre Seigneur et Maître Muhammad, Son noble Envoyé et Son Serviteur, et que l’agrément divin entoure sa Famille et ses Compagnons après lui !

Il s’est trouvé que quelques frères -Dieu leur accorde longue vie!- ont porté à ma connaissance un mémoire (taqyîd) arrivé de la Rive d’Andalus, cette patrie de l’alerte aux frontières et de la guerre sainte, asile des hommes vertueux et des ascètes, des juristes et des adorateurs de Dieu. Ce mémoire s ‘adressait à quelques personnalités marquantes de la ville de Fès, où le pouvoir royal fait entendre sa voix de lion, où les océans des sciences de la religion gonflent leurs flots majestueux, où Dieu prépare une récompense qu’Il tient en réserve pour les défenseurs de Sa religion et de Son califat.

Il demandait qu’on fit la lumière sur (une question concernant) la Voie des Soufis, sectateurs de la réalisation spirituelle (tahaqquq) dans la confession du Dieu Unique obtenue par le goût spirituel (fî-l-tawhîd al-dhawî) et dans la connaissance procédant de l’intérieur (al-ma’rifa ak-wijdâniyya), à savoir: Pouvait-on tenir pour valables le cheminement de cette Voie (sulûkuhu), l’aboutissement (al-wusûl) par elle à la connaissance savoureuse et à la levée du voile nous dérobant le monde spirituel, en suivant l’enseignement des livres composés pour ses adeptes et en réglant sa conduite sur les doctrines (qu’ils y exposent) pour expliquer les modalités de cette Voie, de sorte qu’il suffirait en cela de consulter des traces (écrites), de jeter les yeux sur de savants traités et de s’appuyer sur les livres traitant de la direction des âmes et fournissant toutes les conditions requises depuis le départ jusqu’à l’arrivée, (ce que font des ouvrages) comme l’Ihyâ’ et la Ri’âya ?  ou bien faut-il absolument un maître spirituel (shaykh) qui signale clairement les repères pour s’y orienter, qui mette en garde contre les malheurs inopinés, et qui fasse pour le novice (murîd) le discernement requis par les questions qu’il se pose quand il ne voit pas clair dans les inspirations qui lui viennent et dans ses états spirituels, de sorte qu’il remplirait l’office du médecin auprès de ses malades et du chef équitable pour la nation livrée à l’anarchie ?

وَنَقل مُنَاظَرَة مُرِيدِينَ جَرَتْ فِي ذَلِكَ، رَدًا وَقَبُولاً، وَحُشِرَتْ مَعْقُولاً وَمَنْقُولاً، مَا بَيْنَ مَسُوغٍ لِهَذَا السُّلُوكِ مِنْ غَيْرِ شَيْخٍ يَقْتَدِي المُرِيدُ بِهِ وَلاَ إِمَامٍ يِأْتَمُّ بِأَدَبِهِ، وَبَيْنَ مُشْتَرِطٍ شَيْخًا يُرَوِّضُ السَّالِكَ وَيُحَذِّرُهُ مَا شَاهَدَ فِي طَرِيقِهِ ِإلَى اللهِ مِنَ المََهَالِكِ، وَيُؤَيِّدُ قِوَاهُ عَلَى احْتِمَالِ المَطْلَعِ؛ وَتَمْيِيزُ السُّنَنِ فِي الأَحْوَالِ الوَارِدَةِ مِنَ البِدَعِ، حَتَّى يَتَحَقَّقُ إِلَـهِيًا مَحْبُورَ الوَقْتِ، مَحْفُوظًا مِنَ الزَّلاَّتِ الَّتِي تُؤَدِّي إِلَى البُعْدِ مِنَ اللهِ وَالمَقْتِ.

فَطَالَ فِي تِلْكَ المُنَاظَرَةِ الجِدَالُ وَحُبٍّ لِاحْتِجَاجِ العُلَمَاءِ وَالأَبْدَالِ.

وَذَهَبَتْ النِّصْفَةُ بَيْنَهُمْ وَالاِعْتِدَالُ. وَالحَقُّ وَإِنْ فَقَدُوهُ، فَقَرِيبٌ فِيمَا اعْتِقَدُوهُ.

فَذَهَبْتُ إِلَى كَشْفِ القِنَاعِ عَنْ مَحَلِّ النِّزَاعِ، وَإِيضَاحِ الحَقِّ فِي الوُصُولِ بِهَذَا الطَّرِيقِ أَوِ الاِنْقِطَاعِ.

وَهَلْ يَسْتَغْنِي المُرِيدُ فِيهَا بِالكُتُبِ وَالأَوْضَاعِ أَوْ لاَ بُدَّ مِنَ الإِمَامِ المَتْبُوعِ وَالشَّيْخِ المُطَاعِ، المُتَعَيَّنِ لَهُ عَلَى المُرِيدِ حُسْنَ الاِقْتِدَاءِ وَالاِتِّبَاعِ وَالعَمَلِ وَالاِسْتِمَاعِ ؟  وَاعْتَمَدْتُ عَلَى اللهِ، وَلِيِّ العَوْنِ وَالحِفْظِ وَالصَّوْنِ، وَهُوَ حَسْبِي وَنِعْمَ الوَكِيلِ.

وَالكَلاَمُ فِي هَذِهِ المَسْأَلَةِ يَسْتَدْعِي تَحْقِيقَ طَرِيقِ الصُّوفِيَّةِ وَتَمْيِيزَهَا مِنْ بَيْنِ سَائِرِ الطُّرُقِ؛ وَكَيْفَ اسْتَقَرَّتْ عِنْدَ الصَّدْرِ الأَوَّلِ مِنْهُمْ فِي نَوْعٍ مِنَ العِبَادَةِ وَالمجَاهَدَةِ وَاخْتَصََّتْ بِهَذَا اِلاسْمِ ثُمَّ صَارُوا ِإلَى مُجَاهَدَاتٍ أُخْرَى وَغَلَبَ اسْمُ التَّصَوُّفِ عَلَيْهَا وَهُوَ المَشْهُورُ عِنْدَ الكَآفَةِ وَكَيْفَ اسْتَعْمَلَهُ بَعْضُ المُتَأَخِّرِينَ فِي نَتَائِجِ المُجَاهَدَاتِ فَقَط، وَالرَّدُّ عَلَيْهِمْ فِي ذَلِكَ.

فَبِبَيَانِ هَذِهِ الاِصْطِلاَحَاتِ يَتَّضِحُ الكَثِيرُ مِنْ هَذَا الغَرَضِ.

وَاللهُ الهَادِي ِإلَى الصَّوَابِ.

Ce mémoire rapportait une controverse qui eut lieu entre novices sur ce point, toute en réfutations et concessions, toute bourrée d’arguments de raison et de tradition, les uns admettant que ce cheminement se fit sans shaykh à imiter par le novice, ni guide (imâm) à suivre en sa conduite, les autres posant comme condition nécessaire un shaykh qui soumît l’itinérant spirituel (sâlik) aux exercices ascétiques, le mit en garde contre les passages dangereux qu’il aurait perçus sur son itinéraire vers Dieu et le rendit assez fort pour supporter la plongée du regard sur le monde invisible (matla’) et pour discerner, dans les états spirituels lui survenant, les pratiques traditionnelles des innovations blâmables, afin de parvenir à la réalisation (hatta yatahaqqaqa), inspiré par Dieu, gratifié de ce moment privilégié, préservé des faux pas qui conduisent à l’éloignement de Dieu et à Son inimitié.

Il y eut, dans cette controverse, une longue polémique. On fit appel, pour argumenter, à des savants et à des saints (abdâl), et l’on vit disparaître entre les deux clans toute équité et toute mesure. Et pourtant la Vérité, même s’ils s’en écartaient, était toute proche de ce qu’ils croyaient.

J’ai donc entrepris de faire la lumière sur l’objet, de cette dispute et d’expliquer clairement où était le vrai dans (cette question de savoir) si l’on parvient au terme en empruntant cette Voie ou si l’on y voit sa marche interrompue. Le novice qui s’y engage peut-il se contenter de livres et autres écrits ? Ou lui faut-il nécessairement un guide à suivre et un shaykh à qui obéir, et qui serait en droit de demander au novice de s’appliquer à l’imiter et à le suivre, à bien se comporter et à l’écouter ?

Je plaçai donc toute ma confiance en Dieu, qui seul prête assistance et protège de l’erreur et du mal, et qui seul me suffit, mon incomparable Garant !

Le discours sur cette question demande qu’on définisse avec exactitude la Voie des soufis et qu’on la distingue de toutes les autres voies ; qu’on examine comment, chez leur toute première génération, elle se concrétisa en un type donné de service de Dieu et de combat spirituel (mujâhada) et reçut en propre ce nom (de Voie des soufis) comment ils en vinrent par la suite à d’autres combats spirituels, pour lesquels prévalut le nom de  tasawwuf, lequel s’est communément répandu dans le grand public ; comment certains modernes utilisèrent ce terme uniquement à propos des résultats de ces combats, et comment on peut les réfuter sur ce point.

Ce sera par l’explication de ces termes techniques que se trouvera élucidée une grande partie de ce sujet.

Et Dieu est Celui qui conduit au but sans erreur !

الفصل الأوّل

الكَلاَمُ في تَحْقِيقِ طَرِيقِ المُتَصَوِّفَةِ

وَتَمَيُّزَهُ عَلَى الجُمْلَةِ مِنْ بَيْنَ طُرُقِ الشَّرِيعَةِ

وَمَدْلُولِ هَذَا اللَّقَبِ عِنْدَ مَنْ سَلَفَ مِنْهُمْ فِي الأُمَّةِ

 

اِعْلَمْ ! نَوَّرَ اللهُ قُلُوبَنَا بِالهِدَايَةِ، أَنَّ اللهَ سُبْحَانَهُ فَرَضَ عَلَى القُلُوبِ عَمَلاً مِنَ الاِعْتِقَادَاتِ وَعَلَى الجَوَارِحِ الظَّاهِرَةِ عَمَلاً مِنَ الطَّاعَاتِ. فَجَمِيعُ التَّكَالِيفِ الشَّرْعِيَّةِ الَّتِي تُعْبَدُ بِهَا الإِنْسَانُ فِي خَاصَّةِ نَفْسِهِ تَرْجِعُ ِإلَى نَوْعَيْنِ:

– أَحْكَامٌ تتَعَلَّقُ بِالأَعْمَالِ الظَّاهِرَةِ، وَهِيَ أَحْكَامُ العِبَادَاتِ وَالعَادَاتِ وَالمُتَنَاوِلاَتِ؛

– وَأَحْكَامٌ تَتَعَلَّقُ بِالأَعْمَالِ البَاطِنَةِ، وَهِيَ الإِيمَانُ وَمَا يَتَصَرَّفُ فِي القَلْبِ وَيَتَلَوَّنُ بِهِ مِنَ الصِّفَاتِ.

أَمَّا المَحْمُودَةُ كَالعِفَّةِ وَالعَدْلِ وَالشَّجَاعَةِ وَالكَرَمِ وَالحَيَاءِ وَالصَّبْرِ، وَأَمَّا المَذْمُومَةُ كَالعَجَبِ وَالكِبْرِ وَالرِّيَاءِ وَالحَسَدِ وَالحَقْدِ. وَهَذَا النَّوْعُ أَهَمُّ مِنَ الأَوَّلِ عِنْدَ الشَّارِعِ، وَإِنْ كَانَ الكُلُّ مُهِمًّا لِأَنَّ البَاطِنَ سُلْطَانُ الظَّاهِرِ المُسْتَوْلِي عَلَيْهِ.وَأَعْمَالُ البَاطِنِ مَبْدَأُ الأَعْمَالِ الظَّاهِرِ؛ وَأَعْمَالُ الظَّاهِرِ آثَارٌ عَنْهَا.

فَإِنْ كَانَ الأَصْلُ صَالِحًا، كَانَتِ الآثَارُ صَالِحَةً؛ وَإِنْ كَانَ فَاسِدًا، كَانَتْ فَاسِدَةً.

قَالَ –صَلَّى اللهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ-:

*إِنَّ فِي الجَسَدِ بِضْعَةً إِذََا صَلُحَتْ صَلُحَ الجَسَدُ وَِإذَا فَسَدَتْ فَسُدَ الجَسَدُ، أَلاَ وَهِيَ القَلْبُ *.

Première Partie

 Définition exacte de la Voie des soufis.

Sa distinction en termes généraux d’avec les diverses voies de la Loi musulmane.

Sens qu’avait ce surnom (laqab) chez les devanciers au sein de la Communauté.

 

Sache donc –puisse Dieu illuminer nos cœurs par la guidance ! – Que Dieu –qu’Il soit exalté ! – a imposé

–          aux cœurs, une œuvre consistant en acte de foi

–          et aux membres extérieurs, une œuvre consistant en actes d’obéissance,

en sorte que toutes les prescriptions (takâlîf) de la Loi religieuse, par lesquels l’homme s’adonne au culte divin, en ce qui le concerne individuellement, reviennent à deux espèces :

–          des qualifications juridiques (ahkâm) se rapportant aux œuvres extérieures, à savoir les qualifications regardant les pratiques cultuelles, les coutumes et les affaires de la vie courante ;

–          et des qualifications juridiques se rapportant aux œuvres intérieures, à savoir la foi et toute la diversité des qualités (sifât) venant affecter le cœur, Les unes louables, comme la tempérance, la justice, le courage, la générosité, la pudeur, la constance ; les autres blâmables, comme la vanité,l’hypocrisie, l’envie, la haine.  Cette dernière espèce de prescriptions est plus importante que la première aux yeux du Législateur – encore que tout soit important-, parce que ce qui intérieur (bâtin)commande et domine ce qui est extérieur (zâhir) et que les œuvres de l’intérieur constituent le principe des œuvres de l’extérieur, tandis que ces dernières sont des effets visibles (âthâr) des premières.

Si donc le fondement est bon et sain, les effets le seront aussi, et s’il est corrompu, ils le seront aussi.

Le prophète a dit : « Il y a dans le corps une parcelle (de chair) telle que si elle est saine, le corps entier l’est aussi, et si elle est corrompue, le corps entier l’est aussi. Et cette parcelle c’est le cœur. » 

وَبَيَانُ ذَلِكَ أَنَّ اللهَ سُبْحَانَهُ خَلَقَ غَرَائِزَ وَقِوَى وَكُلُّ وَاحِدَةٍ مِنْهَا يَطْلُبُ مُقْتَضَى طَبْعِهِ الَّذِي خُلِقَ لَهُ وَجُعِلَ مَعَهُ فِي تَحْصِيلِهِ. فَغَرِيزةُ الغَضَبِ تَطْلُبُ التَّشَفِّي وَالاِنْتِقَامِ وَفِيهِ كَمَانُهَا وَلَذَّتُهَا. وَغَرِيزَةُ الشَّهْوَةِ تَطْلُبُ اللَّذَّةَ بِالمَأْكُولِ وَالمَنْكُوحِ. وَبِالجُمْلَةِ تَحْصِيلُ المَلاَئِمِ وَكَذَلِكَ غَرِيزَةُ العَقْلِ الَّذِي فِيهِ تَطْلِبُ تَحْصِيلَ العِلْمِ وَالمَعْرِفَةِ.

وَلِمَا رَكَّبَ اللهُ فِيهِ مِنْ مَحَبَّةِ الكَمَالِ لاَ يَزَالُ يَتَحَرَّكُ بِكُلِّ مُتَحَرِّكٍ فِيهِ إِلَى تَحْصِيلِ كَمَالِهِ وَالفِكْرُ خَادِمُهُ فِي جَمِيعِ ذَلِكَ: يُرَكِّبُ وَيُحَلِّلُ وَيَجْمَعُ وَيَفْصُلُ.

فَيَتَصَوَّرُ عَدَاوَةَ شَخْصٍ مَا وَيُحَرِّكُ الجَوَارِحَ لِلاِنْتِقَامِ مِنْهُ.

وَيَتَصَوَّرُ جَمَالَ شَخصٍ وَكَمَالَ صُورَتِهِ فَيُحَرِّكُ الجَوَارِحَ لِلاِلْتِذَاذِ بِهِ. وَيَتَصَوَّرُ غِذَاءًا مُلاَئِمًا وَقَدْ وَجَدَ الجُوعَ فَيُحَرِّكُ الجَوَارِحَ لِتَحْصِيلِ ذَلِكَ الغِذَاءِ. وَيَتَصَوَّرُ كَمَالاً فِي شَخْصٍ فَيَوُدُّ انْتِزاعَهُ وَانْفِرَادَهُ بِهِ وَيَغْتَمُّ لِذَلِكَ وَيُؤْسِفُهُ آخَرٌ، فَيَتَصَوَّرُ الاِنْتِقَامَ مِنْهُ وَيَتَوَهَّمُ الكَمَالَ فِي نَفْسِهِ، فَيُعْجَبُ بِذَاتِهِ وَيَزْدَرِي غَيْرَهُ لِتَوَهُّمِ قُصُورِهِ  با

وَتَطْلُبُ غَرِيزَةُ العَقْلِ أَيْضًا مُقْتَضَى طَبْعِهَا وَهُوَ لِلْمَعْرِفَةِ وَالعِلْمِ، فَتُحَرِّكُ الفِكْرَ إِلَى تَحْصِيلِهِ وَتَشْتَاقُ ِإلَى الكَمَالِ الأَعْلَى بِمَعْرِفَةِ خَالِقِهَا، إِذْ لاَ تَرَى وُجُودًا أَكْمَلَ مِنْهُ. فَلاَ تَزَالُ تَطَّلِعُ ِإلَى جَانِبِهِ بِتَصَوُّرَاتٍ وَأَفْكَارٍ تَتَعَاقَبُ عَلَيْهَا تلحم في ذلك تُبْدِي وَتُعِيدُ وَحَرَكَاتُهَا فِي جَمِيعِ هَذِهِ الأُمُورِ مُتَوَاتِرَةٌ مُتَرَادِفَةٌ، لاَ تَفْتُرُ طَرْفَةَ عَيْن وَلاَ يَلْحَقُهَا مِنَ الكَسَلِ وَالمِلَالِ مَا يَلْحَقُ الجَوَارِحَ وَالأَعْضَاءَ؛ وَهِيَ مُنْتَقِلَةٌ دَائِمًا أَسْرَعَ مِنْ إِيمَاضِ البَرْقِ وَحَرَكَةِ الدُّبَالِ بِالرِّيحِ. وَكَذَلِكَ كَانَ-صَلَّى اللهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ-يُكْثِرُ فِي دُعَائِهِ: *يَا مُقَلِّبَ القُلُوبِ*، وَيُقْسِمُ فِي أَكْثَرِ أَمْرِهِ: *لاَ وَمُقَلِّبَ القُلُوبِ!*

وَقَالَ-صَلَّى اللهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ-: *قَلْبُ المُؤْمِنِ بَيْنَ أُصْبُعَيْنِ مِنْ أَصَابِعِ الرَّحْمَنِ*. 

Voici comment cela s’explique : Dieu a créé dans le cœur de l’homme des instincts et des puissances, et chacun de ceux-ci est à la recherche du bien qu’exige sa nature, pour lequel il a été créé et dans l’obtention duquel consistent sa perfection et son accomplissement.

C’est ainsi que l’instinct de l’irascible (ghadab) demande l’assouvissement et la vengeance, en quoi se trouvent sa perfection et sa jouissance, et l’instinct du concupiscible (shahwa) demande les jouissances de la table et du sexe,et, d’une manière générale, l’obtention de ce qui est agréable.

De même, l’instinct de l’intellect (‘aql)qui est en (l’homme) demande l’acquisition de la science et de la connaissance.

A cause de l’amour de la perfection que Dieu a inséré en lui, l’homme ne cesse de mettre en œuvre toutes les facultés de mouvement qui sont en lui pour acquérir sa perfection. Et la pensée discursive (fikr) est sa servante en tout cela, composant et décomposant, unissant et séparant. Ainsi, il se représente l’hostilité que lui voue tel ou tel individu, et il met en mouvement ses membres pour se venger de lui ; il se représente la beauté de telle personne, la perfection de sa conformation, et il meut ses membres pour prendre en elle sa jouissance ; il se représente encore une nourriture agréable, alors qu’il se trouve avoir faim, et il meut ses membres pour se la procurer ; ou encore une perfection existant chez tel ou tel, et il éprouve le désir de la lui arracher, d’être seul à la posséder, au point d’en être chagriné ; ou bien un autre le contrarie, et il imagine comment il pourrait se venger de lui ; ou bien encore il se figure être parfait, en conçoit de la vanité et se met à mépriser les autres en les imaginant bien inférieurs à ce qu’il est de lui-même. L’instinct de l’intellect demande lui aussi ce qui est exigé par sa nature, c’est-à-dire la connaissance et la science. Il meut donc la pensée (fikr) vers leur acquisition. Il désire ardemment la perfection suprême que procure la connaissance de son Créateur, puisqu’il n’estime aucun être créé plus parfait que Lui. Il s’efforce donc sans cesse de s’élever vers Sa Majesté par des représentations et des pensées qui se succèdent en lui ; il en compose tout un tissu qu’il met et remet sur le métier. Et, dans toutes ces opérations, les mouvements de l’intellect s’enchaînent et se pressent les uns les autres sans se relâcher fût-ce le temps d’un clin d’œil, sans que les atteignent la lassitude et l’ennui qui affectent les membres et les autres parties du corps ; ils vont et viennent constamment, plus rapides que le flamboiement de l’éclair, plus vifs que le mouvement des mèches agitées par le vent.

C’est pourquoi le Prophète disait fréquemment dans ses invocations : « Ô Toi qui retournes les cœurs !… » et il prêtait serment, la plupart du temps, par l’expression, « Non, par Celui qui retourne les cœurs ! »

Il disait encore : « Le cœur du croyant est entre deux doigts de la main du Miséricordieux ».

ثُمَّ لَيْسَ كُلَّ مَا يَظُنُّ الٌَلْبُ مِنْ هَذِهِ الغَرَائِزِ أَنَّهُ كَمَالٌ لَهُ وَلَذَّةٌ بِاعْتِبَارِ الأَجَلِ وَحَيَاتِهِ الدَّائِمَةِ الَّتِي أَخْبَرَ الشَّارِعُ بِحَالِ لِعَادَتِهِ فِيهَا وَشَقَاوَتِهِ. فَإِنَّهُ إِنَّمَا أَدْرَكَ اللَّذَّةَ فِي هَذِهِ الغَرَائِزِ بِاعْتِبَارِ عَاجِلِهِ وَحَاضِرِهِ. وَبَقِيَ مَا حَصَلَ فِي القَلْبِ مِنْ أَثََارِ هَذِهِ الأَفْعَالِ وَمَا يَتَلَوَّنُ بِهِ مِنَ الهَيْئَاتِ الَّتِي تَكُونُ لَهُ فِي الأَجَلِ خَيْرًا وَنَعِيمًا أَوْ شَرًّا وَعَذَابًا حَتَّى فِي غَرِيزَةِ العَقْلِ بِمَا يَحْصِلُ فيهَا مِنَ العَقَائِدِ وَالتَّصَوُّرَاتِ فِي جَانِبِ خَالِقِهَا.

فَمِنْهَا مَا هُوَ مُفْضٍ ِإلَى السَّعَادَةِ وَمِنْهَا مَا يُفْضِي إِلَى الشَّقَاءِ وَلاَ طَرِيقٍ ِإلَى مَعْرِفَةِ مَا فِيهِ السَّعَادَةِ بِاعْتِبَارِ الأَجَلِ مِنَ الأَعْمَالِ البَاطِنَةِ كُلِّهَا بَلْ وَالظَّاهِرَةُ إِلاَّ الشَّرْعُ.

بَيَّنَ صَلَوَاتُ اللهِ عَلَيْهِ المَحْمُودَ مِنَ المَذْمُومِ، وَمَيَّزَ الخَبِيثَ مِنَ الطَّيِّبَ، وَنَبَّهَ عَلَى أَنَّ الأَعْمَالَ البَاطِنَةَ أَهَمُّ، لِأَنَّ البَاطِنَ من الاِسْتِقَامَةِ وَمَنْبَعِ الصَّلاَحِ وَفَسَادِ لِجَمِيعِ الأَعْمَالِ كَمَا مَرَّ فِي الحَدِيثِ قَبْل.

وَسِرُّهُ أَنَّ المَطْلُوبَ مِنَ اسْتِقَامَةِ الجَوَارِحِ، إِنَّمَا هُوَ حُصُولُ أَثَارُ الاِسْتِقَامَةِ فِي النَّفْسِ عَوْدًا بَعْدَ بُدْءِ ثُمَّ يَتَضَاعَفُ فِي التِّكْرَارِ حَتَّى تَتَمَكَّنَ مِنْهَا الهِدَايَةِ وَتَصْدُر عَنْهَا الاِسْتِقَامَةِ فِي جَمِيعِ أَعْمَالِهَا مِنْ غَيْرِ تَكَلُّفٍ.

قَالَ-صَلَّى اللهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ-: * أَنَّ اللهَ لاَ يَنْظُرُ إِلَى صُوَرِكُمْ وَأَعْمَالِكُمْ وَلَكِنْ يَنْظُرُ إِلَى قُلُوبِكُمْ*.

وَمِنْ هُنَا كَانَ اِلإيمَانُ رَأْسَ الأَعْمَالِ وَأَرْفَعَ مَرَاتِبَ السَّعَادَةِ لِأَنَّهُ أَرْفَعُ الأَعْمَالِ البَاطِنَةِ كُلِّهَا فَكَيْفَ الظَّاهِرَةِ.

ثُمَّ إِنَّ الصَّحَابَةِ –رِضْوَانُ اللهِ عَلَيْهِمْ- لَمَّا شَرَحَ اللهُ صُدُورَهُمْ لِلإِسْلاَمِ وَقَبِلُوا مِنْ نُورِ الهِدَايَةِ مَا كَانُوا فِيهِ عَلَى بَيِّنَةٍ مِنْ رَبِّهِمْ صَرَفُوا الاِهْتِمَامَ إِلَى أَعْمَالِ البَاطِنِ أَكْثَرَ مِنْ أَعْمَالِ الظَّاهِر. فَكَانُوا يُرَاعُونَ أَنْفَاسَهُمْ وَيُرَاقِبُونَ خَطَرَاتِهِمْ وَيَحْذَرُونَ غَوَائِلَ قُلُوبِهِمْ. وَفِي هَذَا كَانَتْ أَكْثَرُ مُفَاوَضَتِهِمْ وَفَزَعَ بَعْضُهُمْ إِلَى بَعْضِ وَمِنْ      تها مَعْظَم تَحرُّزِهِمْ. 

Cependant, tout ce que le coeur de l’homme pense etre pour lui perfection et jouissance decoulant de ces instincts n’est pas forcement perfection et jouissance pour lui, si on regarde aux fins dernieres (al-Ajil) et a la vie eternelle. Sur ce qu’il en sera de son bonheur ou de son malheur dans cette vie eternelle , c’est le Législateur qui nous a renseignés. Le cœur, lui, ne perçoit la jouissance procurée par ces instincts qu’en fonction de la vie d’ici-bas et du moment présent. Et toutes les traces que les actes laissent dans le cœur, les dispositions extrêmement complexes qui ont été les siennes, tout cela demeurera dans la vie de l’Au-delà sous forme de bien et de béatitude, ou de mal et de tourment. Il en est de même pour l’instinct de l’intellect, car il est le siège des croyances et des conceptions concernant son Créateur. Or certaines d’entre elles conduisent au benheur, tandis que d’autres conduisent au malheur. Et il n’y a pas d’autre moyen pour connaître ce qui, parmi toutes les œuvres intérieures, et même extérieures, procure le bonheur, du point de vue des fins dernières, que la Loi révélée (Shar’). Le Prophète a clairement exposé celles d’entre elles qui sont louables et celles qui sont blâmables ; il a distingué le mauvais du bon ; il a attiré l’attention sur le fait que les œuvres intérieures sont les plus importantes, parce que l’intérieur est la racine de la rectitude (istiqâma)et la source de la bonté comme de la corruption de tous les actes, ainsi qu’il a été dit dans le hadith précédemment rapporté. Et la raison profonde en est que ce qu’on attend de la rectitude dans l’âme, par la répétition. Ensuite ce processus  se renforce par le réitération, jusqu’à ce que la guidance (hidâya) s’établisse solidement dans l’âme et que la rectitude émane d’elle en tous actes, sans aucun effort. Le Prophète a dit : « Dieu ne regarde pas votre aspect extérieur ni vos œuvres : Il regarde vos cœurs. »

Dès lors, c’est la foi qui est le principe des œuvres et le degré le plus élevé du bonheur,parce qu’elle est la plus élevée de toutes les œuvres intérieures. A combien plus forte raison, des œuvres extérieures !

Par suite, les Compagnons, lorsque Dieu «  eut ouvert leurs poitrines à l’Islam » (Coran, xxxix,22) et qu’ils eurent reçu, de la lumière de la guidance, une claire connaissance concernant leur Seigneur, accordèrent plus d’intérêt aux actions de l’intérieur de l’homme qu’à celles de l’extérieur. Ils examinaient leurs âmes, exerçaient une étroite surveillance sur leurs pensées, se méfiaient de la malice de leurs cœurs. C’est là-dessus que roulaient la plupart de leurs conversations, en cela que consistait l’essentiel du soutien qu’ils cherchaient les uns auprès des autres, et c’est contre les faiblesses de leurs cœurs principalement qu’ils se mettaient en garde.

وَاعْتَبَرَ ذَلِكَ فِي مِثْلِ سُؤَالِ عُمَرِ بنْ الخَطَّابِ لِحُذَيْفَةِ –رَضِيَ اللهُ عَنْهُمَا- وَقَدْ ذَكَرَ حُذَيْفَةُ المُنَافِقينَ وَأَشَارَ إِلَى مَا سَمعَ مِنْ رَسُولِ اللهِ-صَلَّى اللهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ- فِي شَأْنِهِمْ.

فَقَالَ لَهُ عُمَرُ: – نَشَدْتُكَ اللهَ الَّذِي بِِإذْنِهِ تَقُومُ السَّمَاءُ وَالأَرْضُ هَلْ تَعْلَمُ أَنَّ رَسُولَ اللهِ –صَلَّى اللهُ عَلَيْهِ  وَسَلَّمَ- سَمَّاني فِيهِمْ ؟. قَالَ: -لاَ ! وَلَسْتُ أُبْرِئُ بَعْدَكَ أَحَدًا. فَانْظُرْ إِلَى حَذَرِ عُمَرَ-رَضِيَ اللهُ عَنْهُ- مِنْ هَذَا النِّفَاقَ. وَتَأَمَّلْ مَا هُوَ، تَجِدْ مَا يُحَذِّرْ مِنْ خَفِيَّاتِ الأَعْمَالِ البَاطِنَةِ المَذْمُومَةِ المُجْتَنِبَةِ ويُعَرِّفُكَ ذَلِكَ أَنَّ شَأْنَهَا مُهِمٌّ وَخَطَرُهَا فِي الدِّينِ عَصِيمٌ.

إِذْ لَوْ كَانَ مُرَادُ عُمَرَ وَحُذَيْفَة بِهَذَا النِّفَاقِ مَدْلُولهُ المَشْهُور: وَهُوَ إِظْهَارُ الإِسْلاَمِ وَ       الكُفْرِ كَمَا كَانَ فِي مُنَافِقِي المَدِينَةِ وَغَيْرِهِمْ لِمَا حَذِرَ عُمَرُ مِنْ ذَلِكَ وَفَزِعَ فِيهِ ِإلَى عِلْمِ حُذَيْفَةَ إِذْ هُوَ يَعْلَمُ مِنْ نَفْسِهِ أَنَّهُ مُبْرَأٌ مِنْهُ وَكَيْفَ يَخْفِي هَذَا عَلَى عُمَرَ وَكُلُّ وَاحِدٍ يَعْلَمُ مِنْ نَفْسِهِ مَا أَكَنَّ وَمَا أَبْدَا. فَالَّذِي حَذِرَهُ عُمَرُ صَنْفًا آخَرَ مِنَ النِّفَاقِ وَهُوَ مَا يَكُونُ فِي أَعْمَالِ البَاطِنِ مِنْ      المُهْلِكَاتِ تَقَعُ فَلْتَةً وَلاَ يَعْلَمُهَا الإِنْسَانُ مِنْ نَفْسِهِ وَيَعْلَمُهَا النَّبِيُّ بِاطِّلاَعِهِ عَلَى القرب وَمُعَايَنَتِهِ لأِعْمَالِهَا وَأَسْرَارِهَا بِمَا خَصَّهُمْ اللهُ بِهِ مِنْ ذَلِكَ.

وَسَاغَ إِطْلاَقَ النِّفَاقِ عَلَى هَذَا الصَّنْفِ مِنَ الأَعْمَالِ لِمَا فِيهِ مِنْ مُخَالَفَةِ مَضْمَرِ البَاطِنِ لِظَاهِرِ الدَّعْوَى: لِأَنَّ دَعْوَى المُؤْمِنِ الاِسْتِقَامَةُ وَهِيَ ظَاهِرُ حَالِهِ وَمَا يَقَعُ مِنْ خَفَيَاتِ الفَلَتَاتِ البَاطِنَةِ الفَادِحَةِ فِي الاِسْتِقَامَةِ وَأَنْ لَمْ تَقَعْ بِاخْتِيَارِهِ. فَهِيَ مُضْمِرَةٌ فِي القَلْبِ فَاشِيَّةُ النِّفَاقِ مِنْ وَجْهِ مُخَالِفَةٌ بَاطِنُهُ لِظَاهِرِهِ. فَتَجُوزُ بِاسْمِهِ إِلَيْهِ وَِإنْ كَانَ يُفَارِقُ النِّفَاقَ المَشْهُورَ بِأَنَّ هَذَا الخَفِيَّ مِنَ العَمَلِ المَذْمُومِ لَمْ يَتَفَطَّنْ لَهُ المُكَلَّفُ إِلاَّ أَنَّهُ مَأْمُورٌ بَبَذْلِ الجُهْدِ فِي مُرَاعَاتِ أَحْوَالِ البَاطِنِ وَحَمْلِهِ عَلَى الاِسْتِقَامَةِ لِيَسْتَقِيمَ بِهِ الظَّاهِرُ وَيَنْجَذِبُ بِالكُلِّيَّةِ إِلَى الهِدَايَةِ وَالسَّعَادَةِ. فَإِنَّ مِنَّتَهُ غَفْلَةٌ أَوْ تَرَاخٍ فِي هَذَا الوَاجِبِ المُتَعَيِّنِ كَانَ مُنَافِقًا وَهَذَا كَمَا أُطْلِقُ اِسْمُ الشِّرْكِ عَلَى الرِّيَّاءِ لِمَا فِيهِ مِنَ التَّشْرِيكِ فِي الوِجْهَةِ بِالعِبَادَةِ. فَإِنَّ المُرَاءِي بِعِبَادَتِهِ ثُمَّ تَخْلُصُ إِلَى اللهِ وَجْهَتَهُ

On peut observer cela dans l’anecdote rapportant la question que ‘Umar Ibn al-Khattâb posa à Hudhayfa, quand celui-ci eut mentionné les hypocrites et fait allusion à ce qu’il avait entendu de la bouche du Prophète à leur sujet.

‘Umar lui dit alors : « Je t’en conjure par Dieu, par la permission duquel subsistent le ciel et la terre, sais-tu si le Prophète m’ nommé parmi eux ! – Non, répondit Hudhayfa. Mais après toi, je ne déclarerai innocent personne d’autre ! ». Vois donc à quel point ‘Umar se méfiait de cette hypocrisie, et demande-toi en quoi elle consistait. Tu trouveras que c’était ce dont il convient de se méfier quand il s’agit des aspects cachés des actes intérieurs blâmables et à éviter. Cela t’apprendra combien ces choses sont importantes, et quel immense danger elles sont pour la religion. En effet, si ce que ‘Umar et Hudhayfa avaient voulu dire par cette hypocrisie était simplement le sens courant du terme, c’est-à-dire afficher les apparences de l’Islam et cacher au-dedans l’incroyance, comme ce fut le cas des hypocrites de Médine et de bien d’autres encore, ‘Umar ne se serait certes pas méfié de pareil défaut ni n’aurait eu recours, sur ce sujet, à la science de Hudhayfa, puisqu’il savait très bien par lui-même qu’il en était exempt. Comment cela aurait-il pu demeurer caché à ‘Umar, quand tout homme sait ce qu’il garde enfoui en lui et ce qu’il manifeste ? Ce dont ‘Umar se méfiait, c’était donc un autre genre d’hypocrisie : c’état ce que les actes intérieurs peuvent recéler de fautes mortelles cachées survenant par inadvertance. L’homme lui-même ne les connaît pas.

Les prophètes, eux , les connaissent, grâce à leur faculté de lire (bi-tilla’ihi) dans les cœurs et de percer leurs actes secrets, en vertu du privilège que Dieu leur a accordé en cette matière.

Il fut donc admis d’appliquer le nom d’hypocrisie à cette sorte d’actes, en raison de la contradiction qui s’y trouve entre ce qui se passe réellement dans les consciences et ce qu’on professe extérieurement, parce que ce que professe le croyant, c’est la rectitude, c’est à dire ce qui apparaît extérieurement de sa condition de croyant, alors que les fautes cachées qui se produisent au-dedans et qui sont autant d’atteinte à cette rectitude -même si elles n’arrivent pas de propos délibéré -restent enfouies dans le cœur, si bien que cela ressemble à de l’hypocrisie, en ce sens qu’il y a contradiction entre le de dans et le dehors.

On étendit donc l’usage du terme à ces fautes, car, même si elles diffèrent de ce qu’on entend communément par hypocrisie, en ce sens que les actes blâmables demeurés cachés ont échappé à l’attention de l’homme religieusement responsable (mukallaf), celui-ci n’en a pas moins reçu le commandement de déployer tous ses efforts pour veiller attentivement aux divers états de sa vie intérieure et pour porter celle-ci à la rectitude, afin que par là l’extérieur se trouve redressé et entraîné en sa totalité vers la guidance et la béatitude.

Si donc l’homme tombe dans l’insouciance ou le relâchement dans ce devoir qui lui incombe, c’est un hypocrite.

Il en va ici comme lorsqu’on applique le nom d’associationnisme à la fausse dévotion (riyâ’ ), du fait qu’en celle-ci plusieurs objets se trouvent associés dans l’orientation qu’on donne à sa dévotion.

بَلْ هُوَ مُتَوَجِّهُ مَعَ ذَلِكَ إِلَى المُرَاءِي لَهُ فَصَارَ كَالمُشْرِكِ العَابِدِ تَنِين. فَسَاغَ إِطْلاَقَ اِسْمِ الشِّرْكِ عَلَيْهِ كَمَا وَرَدَ فِي قَوْلِهِ –صَلَّى الله عَلَيْهِ وَسَلَّمَ- لِرِيَاءِ الشِّرْكِ الأَصْغَرِ. وَهَذِهِ كُلُّهَا أَدِلَّةٌ وَاضِحَةٌ عَلَى أَنَّ شَأْنَ البَاطِنِ أَعْظَمَ وَعِلاَجُهُ أَهَمَّ.

وَلِنَأْتِ فِي ذَلِكَ بِمَزِيدِ بَيَانٍ، وَذَلِكَ أَنَّ الأَعْمَالَ الظَّاهِرَةَ كُلُّهَا فِي زِمَامِ الاِخْتِيَارِ وَتَحْتَ طَوْعِ القُدْرَةِ البَشَرِيَّةِ وَأَعْمَالِ البَاطِنِ فِي الأَكْثَرِ خَارِجَةً عَنِ الاِخْتِيَارِ مُتَعَاصِبَةً عَلَى الحُكْمِ البَشَرِي إِذْ لاَ سُلْطَانَ لَهُ عَلَى البَاطِنِ بَلْ وَتَرْجَعُ الأَعْمَالُ الظَّاهِرَةُ إِلَيْهِ لِأَنَّهَا تُحِبُّ سُلْطَانَهُ وَطَوْعَ إِشَارَتِهِ وَفِي زِمَامِ اخْتِيَارِهِ.

وَلِهَذَا كَانَتْ النِّيَّةُ الَّتِي هِيَ مَبْدَأُ الأَعْمَالِ أَصْلاً فِي العِبَادَاتِ عِنْدَ الشَّرْعِ وَرُوحًا لَهَا. حَتَّى أَنَّ العَمَلَ إِذَا خَلَى عَنْهَا بَطُلَ وَلاَ يُعْتَدَّ بِهِ المُكَلَّفُ فِي الاِمْتِثَالِ. قَالَ –صَلَّى اللهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ-:

*إِنَّمَا الأَعْمَالُ بِالنِّيَّاتِ وَِإنَّمَا لِكُلِّ امْرِئٍ مَا نَوَى.

فَمَنْ كَانَتْ هِجْرَتُهُ إِلَى اللهِ وَرَسُولِهِ فَهِجْرَتُهُ إِلَى اللهِ وَرَسُولِهِ،

وَمَنْ كَانَتْ هِجْرَتُهُ إِلَى دُنْيَا يُصِيبُهَا أَوِ امْرَأَةٍ يَتَزَوَّجُهَا فَهِجْرَتُهُ إِلَى مَا هَاجَرَ إِلَيْهِ.*

ثُمَّ لَمَّا دَرَجَ الصَّحَابَةُ –رِضْوَانُ اللهِ عَلَيْهِمْ- وَجَاءَ العَصْرُ التَّالِي لِعَصْرِهِمْ، تَلَقَّى أَهْلُهُ هَدْىَ الصَّحَابَةِ مُبَاشَرَةً وَتَلْقِينًا وَتَعْلِيمًا، وَقِيلَ لَهُمْ « التَّابِعُونَ ».

ثُمَّ قِيلَ لِأَهْلِ العَصْرِ الذِينَ بَعْدَهُمْ « أَتْبَاعُ التَّابِعِينَ ».

ثُمَّ اخْتَلَفَ النَّاسُ وَتَبَايَنَتْ المَرَاتِبُ وَفَشَا المَيْلُ عَنِ الجَادَّةِ وَالخُرُوجِ عَنِ الاِسْتِقَامَةِ وَنَسِيَ النَّاسُ أَعْمَالَ القُلُوبِ وَأَغْفَلُوهَا.

وَأَقْبَلَ الجُمُّ الغَفِيرُ عَلَى صَلاَحِ الأَعْمَالِ البَدَنِيَّةِ وَالعِنَايَةِ بِالمَرَاسِمِ الدِّنِيَّةِ مِنْ غَيْرِ اِلْتِفَاتِ إِلَى البَاطِنِ وَلاَ اهْتِمَامٍ بِصَلاَحِهِ.

وَشُغِلَ الفُقَهَاءُ بِمَا تَعُمُّ بِهِ البَلْوَى مِنْ أَحْكَامِ المُعَامَلاَتِ وَالعِبَادَاتِ الظَّاهِرَةِ حَسْبَمَا طَالَبَهُمْ بِذَلِكَ مَنْصَبُ الفُتْيَا وَهِدَايَةُ الجَمْهُورِ.

فَاخْتَصَّ أَرْبَابُ القُلُوبِ بِاسْمِ « الزُّهَّادِ » وَ »العُبَّادِ » وَ »طُلاَّبُ الآخِرَةِ » مُنْقَطِعِينَ إِلَى اللهِ، قَابِضِينَ عَلَى أَدْيَلِهِمْ كَالقَابِضِ عَلَى الجَمْرِ حَسْبَمَا

En effet, celui qui fait parade de sa dévotion ne s’adresse pas en toute pureté d’intention à Dieu: il s’adresse en même temps à celui à qui il en faire accroire. Ce faisant, il devient comparable à l’associateur qui donne à son adoration deux objets. C’est pourquoi il est permis de parler d’asssociationnisme à son propos, comme cela nous est rapporté dans cette parole du Prophète : « La fausse dévotion est le petit associationnisme ». Tout cela constitue des preuves claires que le rang à donner aux réalités intérieures est très élevé et que le traitement à leur accorder est de la plus haute importance.

Apportons là-dessus  de plus amples éclaircissements. Les actes extérieurs sont tous sous la dépendance du libre arbitre et à la discrétion de la puissance (qudra) humaine, tandis que les actes intérieurs, la plupart du temps, échappent au libre arbitre et sont rebelles au gouvernement humain, puisque celui-ci n’a aucun empire sur l’intérieur, mais qu’en revanche c’est de lui que dépendent les actes extérieurs, parce que ceux-ci tombent sous son empire et sous la dépendance de son libre arbitre. C’est pourquoi l’intention (niyya), qui est le principe des actes, constitue le fondement des actes cultuels au regard de la législation religieuse, comme aussi leur esprit (rûh), à telle enseigne que, si l’agir de l’homme vient à manquer de cette intention, il est sans valeur, et que l’homme soumis aux prescriptions religieuses ne saurait être considéré comme y ayant satisfait. Le Prophète a dit : « Les actions ne valent que par les intentions, et il n’est compté à l’actif de chaque homme que ce dont il avait l’intention/ Ainsi, celui dont l’Emigration s’est faite pour Dieu et Son Prophète, son Emigration est tenue comme faite pour Dieu et Son Prophète ; celui sont l’Emigration s’est faite pour un avantage temporel ou pour une femme à épouser, son Emigration est tenue comme faite pour ce qu’il se proposait en émigrant ».

Ensuite, lorsque les Compagnons disparurent et que vint la période suivante, les gens de ce temps-là reçurent la Bonne Direction (al-Hudâ) des Compagnons, directement et sous forme d’explications et d’enseignements. Ceux-là furent appelés« les Suivants ».

Puis ceux de la génération qui vint après eux furent appelés «  les Suivants des Suivants ».

Ensuite, les gens se divisèrent. Leurs rangs se dissocièrent. Partout on dévia hors du grand chemin (jâdda) et on sortit de la rectitude. Les gens oublièrent et négligèrent les actions des cœurs. La grande masse mit tout son intérêt dans la validité des œuvres corporelles et dans la stricte observation des rites religieux, sans prêter attention aux réalités intérieures ni s’intéresser à leur validité. L’activité des juristes consista à répondre aux besoins, communément partagés, en qualifications juridiques à appliquer aux obligations sociales et aux pratiques cultuelles extérieures, selon que l’exigeait d’eux leur fonction, qui était d’émettre des avis juridiques (futyâ) et de guider la masse du peuple. Ceux qui se souciaient des choses intéressant les cœurs (arbâb al-qulûb) reçurent alors les noms d’ascètes, d’adorateurs, de chercheurs de la vie future. Ils se séparaient de tout pour être à Dieu, tenant fermement en mains les exigences de leur religion, « à la manière de celui qui tient des charbons ardents », ainsi qu’on le rapporte dans le hadith.

ثُمَّ طَرَقَتْ آفَةُ البِدَعِ فِي المُعْتَقَدَاتِ وَتَدَاعِي العِبَادَةِ وَإِلَى هَذَا مُعْتَزِلِي وَرَفْضِي وَخَارِجِي لاَ يَنْفَعُهُ    حُ أَعْمَالِهِ الظَّاهِرَةِ وَلاَ البَاطِنَةِ مَعَ فَسَادِ المُعْتَقَدِ الَّذِي هُوَ رَأْسُ الأَمْرِ. فَانْفَرَدَ خَوَاصُّ السُّنَّةِ المُحَافِظُونَ عَلَى أَعْمَالِ القُلُوبِ، المُقْتَدُونَ بِالسَّلَفِ الصَّالِحِ فِي أَعْمَالِهِمْ البَاطِنَةِ وَالظَّاهِرَةِ وَسُمُّوا بِالصُّوفِيَّةِ.

قَالَ الأُسْتَاذُ أَبُو القَاسِمْ القُشَيْرِي: اِشْتَهَرَ هَذَا الاِسْمُ قَرِيبَ المِائِتَيْنِ مِنَ الهِجْرَةِ،

ثُمَّ تَتَابَعُوا جَيْلاً بَعْدَ جَيْلٍ، وَأُمَّةٌ بَعْدَ أُمَّةٍ، يَهْتَدِي الخَلَفُ مِنْهُمْ بِالسَّلَفِ وَيُودِي مَا لُقِنَ عَنْ شُيُوخِهِ لِمَنْ وَفَّقَهُ اللهُ مِنْ أَتْبَاعِهِ وَصَارَ فَقْهُ الشَّرِيعَةِ عَلَى نَوْعَيْنِ:

الأَوَّلُ: فِقْهُ الظَّاهِرِ، وَهُوَ مَعْرِفَةُ الأَحْكَامِ المُتَعَلِّقَةِ بِأَفْعَالِ الجَوَارِحِ فِيمَا يَخُصُّ المُكَلَّفِينَ فِي أَنْفُسِهِمْ، وَيَعُمُّهُمْ مِنْ عِبَادَاتٍ وَعَادَاتٍ وَغَيْرِهَا مِنَ الأَفْعَالِ الظَّاهِرَةِ. وَهَذَا المُسَمَّى بِالفِقْهِ فِي المَشْهُورِ، وَحَامِلُهُ الفَقِيهُ، وَهُمْ أَهْلُ الفُتْيَا وَحَرَسَةِ الدِّينِ.

النَّوْعُ الثَّانِي: فِقْهُ البَاطِن، وَهُوَ مَعْرِفَةُ الأَحْكَامِ المُتَعَلِّقَةِ بِأَفْعَالِ القُلُوبِ وَمضا يَخُصُّ المُكَلَّفُ فِي نَفْسِهِ مِنْ أَفْعَالِ الجَوَارِحِ فِي عِبَادَتِهِ وَتَنَاوُلِهِ لِضَرُورِيَّاتِهِ. وَيُسَمَّى هَذَا فِقْهُ القُلُوبِ، وَفِقْهُ البَاطِنِ وَفِقْهُ الوَرَعِ وَعِلْمُ الآخِرَةِ، وَالتَّصَوُّفِ.

وَكَثْرَةُ العِنَايَةِ بِالنَّوْعِ الأَوَّلِ الذِي هُوَ الفِقْهُ لِعُمُومِ البَلْوَى وَاحْتِيَاجِ السُّلْطَانِ وَالكَآفَةِ لِمَنْصِبِ الفَتْيَا، فَكَثُرَ نَاقِلُوهُ فِي كُلِّ عَصْرٍ، وَتَعَدَّدَتْ فِيهِ المَوْضُوعَاتُ. وَبَقِيَ النَّوْعُ الآخَرُ الَّذِي هُوَ الأَهَمُّ عَلَى كُلِّ أَحَدٍ فِي نَفْسِهِ قَلِيلاً أَوْ مَهْجُورًا وَرُبَّمَا خشِيَ بعْضُ عُلَمَائِهِ لِأَجْلِ ذَلِكَ      وَذَهَابِ أَهْلِهِ. فَيُجْهَلُ حُكْمُ اللهِ فِي أَفْعَالِ القُلُوبِ وَحَرَكَاتِ البَوَاطِنِ الَّتِي هِيَ أَهَمُّ عَلَى المُكَلَّفِ وَأَقْرَبُ بِهِ ِإلَى النَّجَاةِ. فَكَتَبُوا فِي ذَلِكَ مُصَنَّفَاتٍ هِيَ أُمَّهَاتُ الإِفَادَةِ. فَإِنْ كَانَتْ لاَ تَتَعَدَّدُ كَمَا فَعَلَهُ ابْنُ عَطَاءِ وَالمُحَاسِبِي فِي كِتَابِ الرِّعَايَةِ، وَتَابَعَهُ الغَزَالِي فِي كِتَابِ الإِحْيَاءِ.

ثُمَّ أَنَّ نَظَرَ الفَقِيهِ وَنَظَرَ المُتَصَوِّفِ عَلَى التَّفْسِيرَيْنِ المَذْكُورَيْنِ   فِيمَا يَنْقُصُ المُكَلَّفُ فِي نَفْسِهِ مِنْ أَفْعَالِ الجَوَارِحِ فِي عِبَادَتِهِ وَتَنَاوُلِهِ لِضَرُورِيَّاتِهِ

Ensuite survint la calamité des innovations blâmables en matière de dogmes, et l’on fit assaut de prétentions à la piété et à l’ascétisme : ici un mu’tazilite, là un rafdî, là encore un kharijite, toutes gens à qui il ne servait de rien de réformer leurs actions extérieure, pas plus que leurs actions intérieures, dès lors qu’elles s’accompagnaient de l’altération du donné de la foi, qui est le point capital de l’affaire. Alors apparut un groupe à part, celui de l’élite des Sunnites (khawâss al-Sunna), observateurs fidèlesdes actions des cœurs, imitateurs des vertueux Anciens dans leurs actions tant intérieures qu’extérieures. Ceux-là furent appelés « les Soufis ».  « Ce nom, dit le Maître (al-Usthad) Abû l-Qâsim Qushairî, se propagea aux alentours de l’an 200 de l’Hégire. »

Ensuite  les gens se succédèrent les uns aux autres, génération après génération, nation après nation, les successeurs prenant pour guides les devanciers et transmettant ce qu’ils avaient appris de leurs maîtres à ceux de leurs adeptes que Dieu favorisait de Son assistance. Ainsi le droit (fiqh) de la LoiIslamique (Sharî’a) en vint à constituer deux espèces :

La première est le fiqh de l’extérieur (fiqh al-zâhir) c’est à dire la connaissance des qualifications juridiques relatives aux actions des membres, en ce qui concerne personnellement les croyants responsables en tant qu’individus ou en ce qui les concerne collectivement, en fait de pratiques cultuelles, coutumes et autres actions extérieures. C’est ce qu’on appelle fiqh au sens courant, et le détenteur de cette science est le juriste (faqîh). Ces hommes sont les spécialistes des consultations juridiques (ahl al-futyâ) et les gardiens de la religion.

La seconde espèce est le fiqh de l’intérieur, c’est à dire la connaissance des qualifications juridiques relatives aux actions des cœurs et à ce qui concerne personnellement le croyant responsable en tant qu’individu en fait d’actions des membres dans sa pratique cultuelle et le traitement des nécessités de sa vie courante. C’est ce qu’on appelle fiqh des cœurs, fiqh de l’intérieur, fiqh de la cnscience scrupuleuse (fiqh al-wara’), ou encore science de la Vie dernière (‘ilm al-Akhira), ou enfin tasawwuf. On vit augmenter l’intérêt porté à la première espèce, c’et à dire au fiqh, à cause de l’extension à tous de ces besoins et de la nécessité, pour le Sultan et pour la masse, d’avoir recours à la fonction du spécialiste en avis juridiques. Les détenteurs de ce fiqh se multiplièrent à toutes les époques et le nombre des questions traitées s’accrut. Quant à l’autre espèce, qui est la plus importante pour tout homme, d’un point de vue personnel, elle fut peu pratiquée ou même délaissée. C’est peut-être à cause de cela que certains savants qui s’y consacraient craignirent qu’elle ne s’effaçât et que ses tenants ne disparussent, et qu’on n’en vint par là àne plus connaître le jugement de Dieu sur les actions des cœurs et les mouvements de la vie intérieure, qui sont, pour le croyant responsable, la chose la plus importante et la plus susceptible de le conduir eau salut (al-najât).  Aussi écrivirent-ils sur ces sujets des ouvrages qui sont d’un intérêt primordial, même si leur nombre est restreint. C’est ce que firent Ibn ‘Atâ’, Muhâsibî dans son livre de la Ri’âya, et Ghazalî, leur successeur, dans son livre de l’Ihyâ’. D’autre part, le point de vue du juriste (faqîh) et celui du pratiquant du soufisme (mutaawwif), selon les deux types d’explications susdits, trouvent un terrain commun dans les obligations propres au croyant en tant qu’individu, quand il s’agit des actions des membres, lors de sa pratique cultuelle et des affaires de sa vie courante.

وَيَمْتَازُ المُتَصَوِّفُ وَالمُتَوَرِّعُ بِالنَّظَرِ فِي أَفْعَالِ القُلُوبِ وَاعْتِقَادَاتِهَا. وَيَمْتَازُ الفَقِيهُ بِالنَّظَرِ فِيمَا يَعُمُّ المُكَلَّفِينَ مِنَ المُعَامَلاَتِ وَالأَنْكِحَةِ وَالبُيُوعِ وَالحُدُودِ وَغَيْرِ ذَلِكَ مِنْ أَبْوَابِ الِفقْهِ.

وَفَرَّقَ الغَزَالِيُّ بَيْنَ نَظَرِ الفَقِيهِ وَالمُتَصَوِّفِ فِيمَا يَنْظُرَانِ فِيهِ مِنَ العِبَادَاتِ وَالمُتَنَاوِلاَتِ، فَإِنَّ نَظَرَ الفَقِيهِ مِنْ حَيْثُ يَتَعَلَّقُ بِمَصَالِحِ الدُّنْيَا، وَنَظَرَ المُتَصَوِّفِ مِنْ حَيْثُ يَتَعَلَّقُ بِمَصَالِحِ الآخِرَةِ، قَالَ:

« لِأَنَّ نَظَرَ الفَقِيهِ فِي العِبَادَاتِ الَّتِي رَأْسُهَا الإِسْلاَمُ، إِنَّمَا هُوَ مِنْ حَيْثُ أَنَّهَا هَلْ صَحَّ فَتَكُونُ مَجْزِيَّةٌ وَيَقَعُ بِهَا الاِمْتِثَالُ وَيَسْقُطُ القَضَاءُ أَوْ تَفْسُدُ. فَلاَ تَكُونُ مَجْزِيَّةٌ وَلاَ يَقَعُ لَهَا الاِمْتِثَالُ. فَلاَ يَسْقُطُ القَضَاءُ أَوْ مِنْ حَيْثُ يَمْتَنِعُ مِنَ الأَذَاءِ، فَيُبَاحُ دَمُهُ أَوْ يُؤْدَى بِعِصْمِ دَمِهِ. وَكَذَا نَظَرُهُ فِي الحَلاَلِ وَالحَرَامِ، إِنَّمَا هُوَ مِنْ حَيْثُ أَنَّهُ تَصَرَّفَ فِي مَالِ الغَيْرِ، هَلْ يُنْتَزَعُ مِنْ يَدِهِ لِمُسْتَحَقِّ شَرْعًا أَمْ لاَ. وَمَا يَتَرَتَّبُ عَلَى ذَلِكَ مِنْ آثَارِ سُقُوطِ العَدَالَةِ وَثُبُوتِهَا، وَهَذِهِ كُلُّهَا أُمُورٌ دُنْيَوِيَّةٌ. »

قَالَ: « وَالمُتَصَوِّفُ يَنْظُرُ فِي ذَلِكَ كُلِّهِ مِنْ حَيْثُ أَنَّهَا حَزَازَاتٌ لِلْقُلُوبِ وَمُؤَثِّرَةٌ فِي الاِسْتِقَامَةِ الَّتِي هِيَ أَصْلُ النَّجَاةِ. فَيَرَى أَنَّ الصَّلاَةَ لَمَّا كَانَتْ عِبَادَةٌ وَأَصْلُهَا التَّوَجُّهُ بِالقَلْبِ، فَإِنَّمَا يَبْقَى أَنَّهَا زَادًا لِلآخِرَةِ، مَا حَصَرَهُ القَلْبُ لاَ مَا غَابَ عَنْهُ.

قَالَ –صَلَّى اللهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ-:* وَِإنَّمَا لَهُ مِنْ صَلاَتِهِ مَا عَقَلَ مِنْهَا*؛ وَقَالَ: *إِنَّ الرَّجُلَ لَيُصَلِّي الصَّلاَةَ لَيْسَ لَهُ نَصْفُهَا ثُلُثُهَا رُبُعُهَا ِإلَى عُشْرِهَا*.

وَكَذَلِكَ اِلإسْلاَمُ الَّذِي هُوَ إِقْرَارٌ وَاعْترَافٌ، فَإِنْ لَمْ تَقَعْ صُورَةُ ذَلِكَ فِي القَلْبِ حَتَّى ظَهَرَ أَثَرُ الاِعْتِرَافِ عَلَى الجَوَارِحِ بِالتَّسْخِيرِ فِي الطَّاعَةِ، وَإِلاَّ فَلاَ أَثَرَ لَهُ فِي الآخِرَةِ. وَكَذَلِكَ الحَلاَلُ وَالحَرَامُ 

Mais le Mutasawwif et celui qui obéit à une conscience scrupuleuse (mutawarri’), se distinguent en ceci que leur regard porte sur les actions des cœurs, leurs croyances et leurs variations ; ils y discernent le louable du blâmable, le salutaire du pernicieux, le mal de son remède ; tandis que le juriste se distingue en ce que son regard va à tout ce qui est commun à tous les croyants en fait de rapports sociaux, mariages, ventes, peines légales (hudûd) et autres chapitres du fiqh.

Ghazâlî établit, entre le point de vue du faqîh et celui du mutasawwif, lorsque l’un et l’autre considèrent les pratiques du culte et les affaires de la vie courante, la distinction suivante : tandis que le regard du juriste se définit par son rapport aux intérêts de ce bas monde, le regard du mutasawwif se définit par rapport aux intérêts du monde à venir.

Voici ce qu’il dit : « Il en est ainsi parce que le point de vue du juriste sur les pratiques cultuelles, dont le principe est l’islam, se caractérise par la question suivante : sont-elles valables (hal tasihhou) ? Auquel cas, elles méritent rétribution et on a par elles satisfait à l’obligation et évité la condamnation. Ou bien : sont elles mauvaises ? Auquel cas, elles ne méritent pas rétribution et elles ne font pas satisfaire à l’obligation et éviter la condamnation. Ou bien encore le faqîh examinera si tel homme se refuse à accomplir ses obligations, et dès lors son sang est licite, ou au contraire, s’il les accomplit, et dès lors sa vie est sauvegardée. De même quand au regard qu’il porte sur le licite et l’illicite : il s’agira seulement de savoir par exemple s’il y a eu détournement du bien d’autrui, et dès lors si ce bien sera enlevé à un tel pour être restitué à celui qui y a droit selon la Loi religieuse, ou non, et, sur la base de tout cela, quels effets découleront de la suspension de la fonction de notaire (‘adâla) ou de son maintien. En tout cela, il s’agit d’affaires temporelles (dunyawiyya). »

Et Gazâlî poursuit : « Le mutasawwif, lui, regarde à toutes ces choses en tant qu’elles sont des blessures pour les cœurs et qu’elles portent atteinte à la rectitude (istiqâma), laquelle est le fondement du salut (najât). Ainsi de l’opinion qu’il aura sur la prière rituelle : parce que celle-ci est une pratique cultuelle consistant fondamentalement à se tourner vers Dieu de tout son cœur, il ne subsistera d’elle, comme viatique emporté pour la vie future, que ce à quoi le cœur aura été véritablement présent, non ce dont il aura été absent. Le Prophète a dit : « Il ne reviendra à l’homme de sa prière, que ce qu’il en aura saisi par l’intelligence (mâ ‘aqala minhâ) ». Il a dit encore : « Tel homme pourra bien accomplir sa prière sanns que pour autant il lui en revienne la moitié du mérite, ou le tiers, ou le quart et ainsi de suite jusqu’au dixième ». De même pour la confession de l’Islam, qui est affirmation verbale (iqrâr) et confession extérieure (i’tirâf). En effet, il ne s’est pas plus tôt produit une image de cela dans le cœur que l’effet de la confession extérieure sur les membres apparaît par leur mise en service dans l’obéissance aux principes divins . Autrement, il n’en subsisterait aucune trace dans la vie future. De même pour le licite et l’illicite :

ِإنَّمَا هَذَا العِلْمُ أَيْضًا مَعَ الكَسْبِي كَمَا قَدَّمْنَاهُ. فَإِذَا كَانَ فِي المَعْلُومَاتِ فَهُوَ أَجَلٌّ وَاَشْرَفُ، وَفِي العُلُومِ مَا هُوَ أَتَمُّ وَأَوْضَحُ. وَكَانَ الشَّوْقُ إِلَى العِلْمِ بِهِ تَسْدِيدًا. فَالعِلْمُ بِهِ   العلُوم لاَ مَحَالَةَ.

وَلَيْسَ فِي الوُجُودِ أَعْلَى وَلاَ أَشْرَفَ وَأَكْمَلَ مِنْ خَالِقِ الأَشْيَاءِ وَمُوجِدِهَا وَمُرَتِّبِهَا. وَهَلْ يَتَصَوَّرُ أَنْ تَكُونَ حَضِيرَةُ فِي الكَمَالِ وَالجَمَالِ أَعْظَمَ مِنَ الرُّبُوبِيَّةِ الَّتِي لاَ يُحِيطُ بَادِي جَلاَلِهَا وَصْفَ وَاصِفٍ؟ وَإِذَنْ الاِطِّلاَعُ عَلَى أَسْرَارِهَا وَالعِلْمُ بِتَرْتِيبِهَا المُحِيطِ بِكُلِّ المَوْجُودَاتِ عِلْمًا لَدُنِيًا إِلْهَامِيًا، وَاطِّلاَعًا كَشْفِيًا، هُوَ أَعْلَى أَنْوَاعِ المَعَارِفِ وَأَكْمَلُهَا وَأَوْضَحُهَا وَأَلَذُّهَا وَأَحْرَى مَا يَحْصُلُ بِهِ الاِبْتِهَاجُ وَالفَرَحُ وَيَسْتَشْعِرُ بِهِ الكَمَالُ.  فَقَدْ تَبَيَّنَ أَنَّ العِلْ