… A l’époque où Sidi Boumedin se sépara du Cheikh Abou Yaza pour prendre le chemin de l’Orient, il se trouvait passé maître dans la plupart des sciences alors cultivées dans les écoles musulmanes ; il s’était acquis déjà la renom de théologien consommé.

La première grande ville, qu’il aborda, après son départ de Fez, ce fût TLEMCEN. L’accueil qu’il y reçut, à son arrivée, ne fût pas de nature à lui inspirer une favorable idée de l’hospitalité de ses habitants. Une députation de ceux-ci vint au-devant de la caravane et lui dit : « Il n’y a pas de place pour vous dans nos murs ; la ville regorge de monde, nous ne pouvons vous permettre d’y entrer. » En même temps, le chef de la députation, comme pour appuyer ses paroles, fit apporter une jatte de lait pleine jusqu’aux bords, et dit :  «  Voilà l’image de TLEMCEN ! »

–          Qu’à cela ne tienne, répondit Sidi Boumedin, en s’avançant à la tête de ses compagnos, vous n’en êtes pas moins de braves gens ! »

Puis, tirant de la poche de son vêtement une rose fraîchement épanouie, bien que la saison de ces fleurs fût depuis longtemps passée, il la déposa silencieusement dans la jatte de lait. C’était son premier miracle. La foule demeura interdite.

A la première surprise succédèrent l’admiration et le respect, et chacun alors de lui crier à l’envi : « Vous êtes notre Seigneur, vous êtes notre maître ; entrez, et soyez le bienvenu parmi nous ! »

Sidi Boumedin, suivi de ses compagnons de voyage, pénétra dans la ville ; mais comme il recherchait la solitude, il se retira sur al montagne, au-dessus d’El-Eubbad, et alla se mettre en oraiosn auprès du tombeau de l’ouali Sidi Abdallah ben Ali

Le peuple vint l’y rejoindre. On voulait entendre sa parole. Lui s’assit au pied d’un olivier qui abritait le tombeau sous son ombre, et se mit à discourir. Pour lors, une feuille d’olivier vint à tomber à ses pieds ; Sidi Boumedin la ramassa et la fit voir aux gens qui l’entouraient. Les plus lettrés distinguèrent sur cette feuille des caractères tracés par une main invisible et qui signifiaient :  « Tlemcen, que de tristesse dans ton sein et que de deuil ! En vérité, si Dieu daigne encore te protéger, ce sera à cause de Sidi ed-Daoudi ».

Sidi Boumedin dût enfin se soustraire aux instances de ses hôtes, qui mettaient tout en œuvre pour le retenir. Après des prédications qui avaient excité l’enthousiasme général, il dit adieu à Tlemcen, qu’il ne devait plus revoir qu’une fois, longtemps après, et pour y mourir.

Il continua son voyage vers l’Orient, s’arrêtant dans toutes les villes importantes qui se trouvaient sur sa route, et y recrutant de nombreux disciples. Arrivé à la Mecque, il y fit la connaissance ud fameux cheikh Sidi Abdelkader el-Djilani, dont le nom est si populaire en Algérie.

Revue Africaine N°19 Oct.1859 Les inscriptions arabes de Tlemcen –X- Mausolée du Cheikh El-Ouali Sidi Boumedin . Ch. Brosselard (p.5-6)

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…Lorsque, à leur école, Abou-Median eut acquis un certain renom, comme théologien et comme savant, il quitta Fez, avec l’intention de faire le pèlerinage après s’être arrêté, sur sa route, dans les principaux centres intellectuels et religieux.

La première ville importante où il se présenta fût TLEMCEN. L’accueil qu’il y reçut ne fût d’abord pas très bienveillant. En effet, soit que les Uléma, ayant entendu parler de sa science et de sa popularité, eussent peur de trouver en lui un rival et un maître, soit pour toute autre cause, il se vit refuser l’entrée de la ville. Une députation de notables, venue à sa rencontre, lui expliqua qu’il n’y avait pas de place pour lui dans la ville, que Tlemcen était aussi rempli de professeurs que la jatte de lait qu’on lui offrait, et qui était pleine à déborder. Mais Abou-Median, tirant de son burnous une rose nouvellement éclose, bien que ce ne fût pas la saison de ces fleurs, effeuilla, sur la jatte de lait, les pétales qui surnagèrent sans faire déborder le liquide.

Cette réponse muette et le prodige de la rose fraîche, à une pareille époque de l’année, changèrent complètement les dispositions des gens de Tlemcen, qui l’accueillirent avec empressement.

Il s’établit alors sur la montagne qui domine le village d’El-Eubbad, auprès du tombeau de l’ouali Sid Abdallah-ben-Ali.

Là, il professa assez longtemps avec un très grand succès, et ne tarda pas à acquérir ; par ses vertus et son éloquence, une réputation bien établie de sainteté et de savoir.

Cependant, se dérobant aux ovations de ses auditeurs, il partit pour La Mecque, où il rencontra Sid Abd-el-Qader-el-Djilani, venu comme lui en pèlerinage.

Les deux savants ne tardèrent pas à se lier d’une étroite amitié et Abou-Median, devenu le disciple de prédilection de Sid-El-Djilani, suivit à Baghdad son nouveau maître.

Après avoir séjourné quelque temps dans cette ville, il retourna en Espagne, professa à Séville, à Cordoue, et enfin, vint s’établir à Bougie où les hautes études théologiques étaient en grand honneur.

Louis RINN : Marabouts et Khouans – Etude sur l’Islam en Algérie – Chapitre XVII ; pages212-213

 

 إعداد: محمد بن أحمد باغلي